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L'enluminure a-t-elle une réelle définition ?

  • nouveauxfdl
  • 6 août 2015
  • 5 min de lecture

Cher amis bonjour !


Je souhaite vous parler un peu de la définition propre de l’art de l’enluminure pratiquée aujourd’hui. Un sujet soumis à de nombreuses questions dans ce domaine ...


L’époque médiévale, qui est extrêmement large, lui donne une définition simple : L’illustration et la décoration des textes importants de cette civilisation, religieux ou bien profanes, … évangiles ou recueils scientifiques si vous préférez. Aujourd’hui, épris d’amour pour la brillance de la feuille d’or, et les couleurs somptueuses, nombreuses sont les personnes pratiquant l’art de l’enluminure, et à raison !

Parchemin et par Pot, Lettrine C enluminée


Cependant une chose est importante à savoir… La pratique de cet art dans notre monde moderne est-elle strictement la même ? Avons-nous gardé la même définition de cet art que celle de toute l’époque médiévale… ?

Qu’est-ce que l’on crée vraiment, en enluminure contemporaine ?


Un art de reproduction


La reproduction de manuscrits et d’enluminure sur de nombreux supports ne date pas d’hier. De nombreux témoignages nous prouvent que beaucoup d’enlumineurs à l’époque médiévale reproduisaient les modèles de peinture afin de s'approprier le style, l’allure du corps, la forme des membres et leur positionnement dans l’espace dédié à la peinture. Ce fut le cas, par exemple, pour les Très Belles Heures de Jean de Berry, dont certaines peintures reprennent clairement le style et l’allure des corps du Parement de Narbonne. Chaque époque étant marquée par un goût général pour un style particulier ou une mode, cela ne choque personne. Aujourd’hui, nombreux sont les passionnés d’art du manuscrit médiéval qui reproduisent ces témoignages au sens propre. L’atelier Marlier, l’atelier du Chien Noir, Vellum Scriptoria, … tous ces ateliers et bien d’autres encore recopient ou plutôt reproduisent les œuvres médiévales chères à leurs cœurs.




Mais une chose importante est à garder en tête ! le principe n’est pas de copier bêtement ! Les enlumineurs « copistes » ne reproduisent pas pour purement copier. Ils le font afin de s’approprier les différents styles de l’univers médiéval de l’enluminure. Pourquoi faire ? Acquérir une connaissance réelle de l’œuvre et l’entrainement de la main, et pourquoi pas, atteindre le niveau de Jacquemard le Hesdin ou bien de Jean le Noir.


Pour eux il ne suffit pas simplement de reconnaître le style de Jean Pucelle ou de la lettrine à l’époque de Charles le Chauve, à l’œil. Il s’agit plutôt de revivre le travail, essayer de reprendre le mouvement du pinceau pour un style particulier, ressentir la fatigue due aux heures de patience que les enlumineurs ont vécu pour un manuscrit précieux, la concentration élevée au moment de la création du détail...



Bref, apprendre à vivre le travail au sens propre, en prenant le même chemin que les anciens maîtres, est une des incontournables façons de pouvoir apprendre l’enluminure et s’exercer. C’est presque un stade obligatoire.

Un art créatif?

Créer une enluminure… Qu’est-ce que ça veut dire ? Beaucoup de choses en réalité... Art décoratif très ancien et hautement respecté, on a presque tous été tentés de rester au stade de la reproduction, et timidement lui donner quelques éléments nouveaux. Pourtant d’une certaine manière, l’enlumineur est toujours un peu créateur quand il réalise une nouvelle interprétation d’une œuvre enluminée, ... c’est logique.

Cependant lorsque l'on parle de création, je parle de formes contemporaines ! Comme les autres domaines de l’histoire de l’art, je parle de styles inspirés des formes passées, qui créent des œuvres d’art nouvelles. C’est le cas pour plusieurs enlumineurs, notamment Cheryn Rapp, Annie Bouyer et surtout Benoit Furet ! Ce dernier a su s’inspirer des lettrines filigranées et des écritures de toutes les époques pour créer son propre univers artistique absolument fabuleux ! Les enlumineurs s’adonnant à la pure création ne sont pas si nombreux.


« Oui mais ce n’est plus du médiéval ! » disent les artisans amoureux du passé.


A quel niveau une enluminure contemporaine cesse d’être médiévale ? La réponse est dans la question…

Nous ne vivons plus au Moyen Age, nous sommes en 2015. Toute création dans notre présent est contemporaine d’une certaine manière.


Reproduire des manuscrits, ou plutôt les interpréter, est un fait courant, acceptable et merveilleux chez de nombreux enlumineurs… Mais voilà le petit détail qui gêne… les enlumineurs médiévaux étaient-ils si attachés à la tradition même de leur art ? Leur art, oui, la tradition, beaucoup moins…


Les styles d’enluminure ont, de si nombreuses fois, changé à travers les époques du Moyen Age, les techniques aussi, les provenances de couleurs, les fabrications, les supports, les écritures... Il s’agissait d’un autre présent. Des styles nouveaux se créaient, d’autres horizons d’ouvraient.


Aujourd’hui, on retrouve des pratiquants de ce domaine plus à cheval sur leurs outils et leurs produits que sur leurs enluminures elles-mêmes…! Avoir tendance à s’attacher au décor et l’univers magique, ancien et coloré autour de l’enluminure médiévale, à s’inquiéter sur l’authenticité des outils et des pigments, est compréhensible quand un art n'a pas eu d'autres identité que son passé médiéval... jusqu'à maintenant! Mais quitte à être parfaitement dans l’historique, pourquoi ne pas avoir le même comportement des moines scribes des monastères et nous concentrer sur le travail exécuté plutôt que l'apparence du pinceau ou des boîtes de peinture ? Ce qui comptait pour eux c’est le décor final, et non les outils.


Alors à la fin, faisons-nous de l’enluminure ou bien de la reconstitution historique ? Etre enlumineur aujourd’hui signifie-t-il faire forcément « comme au Moyen Age » une période trop vaste et trop riche pour être reproduite à l’identique?


Reproduire un manuscrit n’est pas un problème en soi, au contraire, c‘est presque essentiel à cet art ! Mais lui redonner une identité fraîche serait une façon bien meilleure de lui faire honneur ! S’inspirer des motifs médiévaux pour créer des œuvres nouvelles, plutôt que les copier, c’est aussi bien rendre grâce à cette époque, et nous permettrait d’apporter notre pierre à l’édifice de cette pratique, et permettre aux générations futures de faire de même. L’amour et la copie de l’ancien sont importants, donner ainsi à l’enluminure, une identité contemporaine l’est encore plus. L’art médiéval ne se perdra pas pour autant, on l’aime trop pour l’oublier.


Mais l'enluminure, qu'est-ce que c'est vraiment ?

Qu’est-ce qui définit l’enluminure par rapport à tous les autres arts de l’illustration ? Qu’est-ce que l’enluminure quand on veut se décoller de l’étiquette médiévale pour lui donner un visage contemporain ?

Nous pouvons reconnaître l’art de l’enluminure à au moins un élément important : le rapport intime et singulier avec le texte, les différents styles inspirés des manuscrits médiévaux … Mais trouver une définition simple et précise, se résume vraiment difficile et même impossible. Au sein de notre association, nous reconnaissons aussi l'enluminure comme un art de la minutie. Nous recherchons la perfection au détail près, que l'oeuvre soit de taille miniature ou de larges dimensions.

Telles les figures grotesques et le lierre poussant à côté des psaumes, l’enluminure est à la fois purement décorative et énigmatique, drôle et sérieuse, monochrome et colorée … bref elle est une forme d’art à laquelle, il n’y a pas vraiment de définition… Elle est une beauté qui parcoure librement les pages et le texte, née à un temps où, en général, l’art n’était pas mis sous un carcan presque divin surpassant l’humain, un piédestal bien éloigné des choses terrestres…

Et nous en revenons au sujet de l’article : s’il fallait donner une définition à cet art, la plus fidèle pourrait justement être l’expression de cette liberté et cette absence de définition…

Et vous? Quelle définition mettez-vous à l'enluminure?

Script Oria

Cliquez sur les images pour voir les autres travaux des enlumineurs ! Images : 1 Parchemin et par Pot : lettrine C enluminée 2 Vellum Scriptoria : Lettrine enluminée 3 Neil Bromley : Manuscrit de Kiana owzar

4 Benoit Furet : Lettrine V enluminée et filigranée

5 Annie Bouyer : Sirènes

6 Pierre-Yves Jolit : A tout Jamais 7 Nikolay Valchev : Lettrines et figures de grotesques

 
 
 

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